Ian Halperin, auteur d’une enquête de quatre ans sur le roi de la pop, dévoile les secrets de son livre. Santé, drogue, argent, famille, homosexualité… le journaliste explique comment il a investigué et innocente l’acteur des accusations de pédophilie
De notre correspondant aux Etats-Unis Olivier O’Mahony - Parismatch.com
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Paris Match. Comment a commencé votre enquête sur Michael Jackson?
Ian Halperin. J’ai toujours beaucoup aimé Michael Jackson, que j'ai rencontré plusieurs fois en public. C’est en 2005, au moment de son acquittement pour abus sexuels, que je me suis mis à enquêter sérieusement. J’ai voulu en savoir plus. Je savais qu’après cette affaire, il était d’humeur suicidaire. Tout le monde le croyait coupable, moi compris.
Comment avez-vous fait pour infiltrer le clan Jackson, réputé ultra-fermé?
Michael est entouré de huit personnes très proches. Deux d’entre elles étaient mes sources anonymes car, comme tous les intimes de Jackson, tenues par un accord de confidentialité. C’est grâce à elles que j’ai pu rencontrer Jackson en tête-à-tête, incognito.
C’est-à-dire?
L’une de mes méthodes d’investigation consiste à travailler en “caméra cachée” pour pénétrer les cercles les plus fermés. Je me suis ainsi fait passer pour un acteur gay pour infiltrer la scientologie, sur laquelle je réalisais un film. Pour rencontrer Michael, que je ne connaissais pas personnellement, j’ai choisi de me transformer en coiffeur – avec l’accord de mes sources. Grâce à elles, j’ai pu le rencontrer au Pizza Parlour, un restaurant de West Hollywood, voilà un an et demi.
Comment était-il?
Déjà très fragile, amaigri, pâle et faible. A l’époque, tout le monde savait qu’il avalait des tonnes de médicaments pas toujours légaux. Je lui ai proposé une nouvelle coiffure, blonde platine zébrée de bleu azur. Il a adoré l’idée, et la conversation s’est prolongée durant près de quarante minutes. Nous avons parlé d’Ava Gardner, qu’il aimait beaucoup. Il connaissait toutes ses coupes de cheveux dans les années 40. Michael était une encyclopédie ambulante.
Comment avez-vous réussi à interviewer deux de ses amants, un serveur de bar de 19 ans et un acteur de 22 ans?
Le plus dur a été d’avoir la confirmation qu’il s’agissait bien d’amants, car j’en connais quatre autres qui se réclament comme tels, dont une star du porno. Ces deux-là sont les seuls pour lesquels j’ai pu réunir des preuves irréfutables, soit auprès des proches de Michael, soit grâce aux photos que l’un d’entre eux m’a montré. Quand j’ai été les voir, ils m’ont raconté leur histoire assez facilement, mais ont refusé d’être cités dans le livre.
Comment avez-vous pu réunir les informations qui vous permettent d’affirmer que les accusations de pédophilie à l’encontre de Michael sont fausses?
J’ai eu accès à des documents judiciaires confidentiels qui prouvent qu’il ne voulait pas du règlement à l’amiable de 1993. Il l’a signé sur ordre de sa compagnie d’assurances. Tout le monde savait qu’il prêtait son lit aux enfants pendant que lui dormait par terre et qu’il n’a jamais abusé sexuellement d’enfants.
A vous entendre, Michael était un saint…
Son seul problème, c’est qu’il ne payait pas ses dettes. Ce n’était pas un businessman. Il accumulait les créanciers qui le harcelaient. Mais c’était un type formidable, malheureusement très mal conseillé.
Qui accusez-vous?
Joe, son père, mais surtout son porte-parole officiel, le Dr Tohme Tohme, qui n’était en rien un docteur, et que la famille ne veut plus voir depuis la mort de Michael. Il y avait aussi cet homme de confiance qui, vers 3-4 heures du matin, filait dans les ghettos de Los Angeles et achetait auprès de dealers des drogues du genre Demerol. A la demande de Michael, qui lui-même était sous influence.
Y avait-il aussi des gens bien dans l’entourage de Michael?
Oui, sa mère Katharine, qu’il avait tous les jours au téléphone, et à qui il devait tout, disait-il. Et puis Grace Rwaramba, la nounou des enfants, que Michael aimait et respectait beaucoup pour son travail. Les enfants sont d’ailleurs bien élevés. Ils vénéraient leur père, qui le leur rendait bien. Il fallait voir Michael apprendre les mathématiques à sa fille ou lui parler d’art. D’après mes sources, ils vont bien, en tout cas le mieux possible, et adorent Katharine.
Quel était le vœu de Michael quant à l’éducation de ses enfants s’il venait à décéder?
Il voulait que Katharine et sa sœur Janet, avec qui il s’entendait bien, s’occupent des enfants ou choisissent elles-mêmes la personne qui en recevrait la garde. Selon mes sources, on va bientôt découvrir un second testament probablement daté de 2006 au plus tôt.
Le 24 décembre dernier, vous annonciez dans le magazine “In Touch” que Michael n’en avait plus que pour six mois à vivre. Comment avez-vous pu émettre ce pronostic qui s’est malheureusement révélé exact à un jour près?
J’ai eu accès à son dossier médical qui montrait qu’il était en très mauvaise santé. Cela m’a valu les menaces d’Anthony Pellicano, le détective privé qui a travaillé pour Jackson pour démonter les accusations de pédophilie. Bien qu’actuellement en prison, celui-ci a fait passer le message comme quoi il fallait que je me calme… Mais cela n’a pas été plus loin.
Quels étaient les problèmes de santé de Michael?
Michael souffrait d’une maladie génétique des poumons, avec laquelle il aurait cependant pu vivre encore de nombreuses années. Mais surtout, il était anorexique, donc risquait l’arrêt cardiaque à chaque instant.
Avez-vous tenté de tirer la sonnette d’alarme?
Oui, j’ai prévenu les organisateurs de son come-back qu’ils risquaient de tuer Michael en jouant avec sa santé. Ils m’ont répondu en gros d’aller me faire voir.
Michael danse pourtant sur les vidéos qu’on a vues de lui, lors des répétitions deux jours avant sa mort…
Oui, mais de l’aveu de ses proches, il était lent, se plaignait en permanence de mal de dos, et prenait des leçons pour réapprendre son “moonwalk”. Il n’y arrivait plus. Après quelques chansons, il était tout simplement épuisé. Si les concerts avaient eu lieu, ses apparitions sur scène auraient duré entre 13 et 16 minutes. Le reste, c’aurait été du remplissage avec danseurs, vidéos, effets spéciaux…
Mais comment les organisateurs pouvaient-ils rester aveugles, vu les sommes en jeu?
Quand ils ont obtenu son feu vert pour dix concerts, ils se sont cru investis d’une licence à imprimer de la monnaie. Ils n’ont rien voulu voir venir. Et sa mort n’était pas une option. Ce qui les inquiétait surtout, c’était ses caprices.
Que retenez-vous de Michael?
Je suis effondré par sa mort et par la multitude de malentendus qui circulent sur sa personnalité. Michael était homosexuel, adorait ses enfants qui étaient tout pour lui, mais souffrait de dépression et de paranoïa. Quand il voulait obtenir quelque chose, il savait faire: pour aller à un concert incognito, il se déguisait en femme, et tout le monde n’y voyait que du feu. A la fin de sa vie, il ne faisait plus grand-chose, ne dormait plus. Mais il essayait quand même de rebondir. Avec un courage incroyable vu son état… Point final